La Traviata
Titre original
La Traviata
Giuseppe Verdi
« La Traviata a été incontestablement une œuvre de rupture qui, comme toutes les œuvres de ce genre, a surpris et désorienté le public avant de le conquérir, et qui par la suite a fait figure de jalon important dans l’évolution de la dramaturgie lyrique du XIXe siècle : c’est la première manifestation d’une certaine modernité, la première fois que la société se représente sans les travestissements historiques habituels et qu’elle réduit la distance qui la sépare de son propre reflet. […] En adaptant la Dame aux camélias, Verdi changeait de cadre et d’époque mais il ne changeait pas de thème puisqu’il retrouvait dans la pièce d’Alexandre Dumas fils un des axes de sa dramaturgie : le sacrifice ; de Oberto à Aida, le sacrifice par une femme de son amour à une cause quelle qu’elle soit est un thème majeur qui occupe le plus souvent une place centrale […]. Si l’amour révèle Violetta à elle-même en lui prouvant qu’elle n’est pas cette aride courtisane qu’elle croyait être devenue et que survit toujours en elle l’âme d’une enfant, c’est moins à cet amour que Verdi s’attache qu’au renoncement et à ses conséquences : Violetta expie une faute dont elle pensait pourtant être lavée et seule la mort la réintègre dans un monde dont son métier l’avait exclue ; en s’effaçant, elle retrouve une place dans ce monde à travers la fonction tutélaire qu’elle revendique lorsque, donnant son portrait à Alfredo, elle lui promet de prier au ciel pour lui et pour la « vierge pudique » qu’il épousera. Si nombreux que soient les fils qui relient la Traviata aux œuvres antérieures de Verdi, il faut néanmoins constater qu’elle représentait un audacieux pari pour l’époque […] : plus de bourgs, de villages ou de châteaux, mais la grande ville moderne ; plus de places d’armes ou de vastes salles du conseil, mais un salon bourgeois ou le boudoir d’une maison de campagne ; le fameux « or » qui excite la cupidité devient tout bêtement de l’argent ; le peuple comme expression collective d’une nation ou les masses chorales traditionnelles (soldats, courtisans, brigands) se fondent dans une foule à la fois différenciée et anonyme ; la cérémonie avec son rituel s’estompe devant les contours moins bien définis de la vie mondaine. »
Gilles de Van (L’Avant-Scène Opéra, n° 51) :
Conférences sur cette œuvre
LA TRAVIATA - Splendeurs et misères d'un sacrifice
LA TRAVIATA : d'où vient le scandale ?
Conférence annulée