Le Médecin malgré lui

Charles Gounod

Cet opéra-comique en 3 actes, sur un livret de Jules Barbier et Michel Carré d'après Molière, a été composé en 1857 et créé à Paris, au Théâtre­ Lyrique, le 15 janvier 1858. Rarement joué aujourd'hui, ce premier vrai succès de Gounod à la scène reste sa plus complète réussite, due à la fusion équilibrée de trois éléments stylistiques: le classicisme mozartien, la meilleure tradition de l'opéra­ comique et la musique française du XVIIe siècle. Berlioz, le premier, a vanté l'atticisme d'une partition que Stra­vinski qualifiera de « petit chef-d'œuvre ». Issu d'un choix inhabituel pour l'époque, le sujet du Médecin malgré lui convient particulièrement au talent de Gounod, plus à l'aise dans la demi-teinte que dans les effets du grand opéra. Une écriture raffinée cerne avec naturel les caractères des différents personnages de Molière. Malheureusement, l'œuvre pâtit de la disparité du texte parlé, celui-là même de la pièce, et du texte chanté qui n'en est que la fade parodie […] Cependant, la verve que les librettistes ont retirée aux paroles, Gounod la réinsuffle à la musique, sertissant les voix avec une orchestration ciselée qui met en valeur les bois et revalorise le rôle des parties intermédiaires. En outre, la souplesse mélodique de la prosodie rajeunit les cadres conventionnels imposés par le genre.

Conscient du problème esthétique que pose l'adaptation d'un texte littéraire possédant sa valeur intrinsèque, le musicien essaiera de prendre sa revanche en entreprenant en 1873, sur la prose même de Molière, un George Dandin laissé inachevé. Il est remarquable que, des quatorze morceaux qui compo­sent Le Médecin malgré lui, les plus neufs soient ceux dont les paroles restent proches de l'original : dans l'acte I, les n° 1 à 4 ; dans l'acte II, le n° 6, c'est-à-dire le sextuor qui, dans le sillage de Mozart, et en intégrant le mélodrame, s'affirme comme une des pages majeures du théâtre lyrique français du XIXe siècle. En effet, la musique mime à merveille le comique de situation en même temps qu'elle peint avec acuité, non sans de subtiles touches de pathétique, le comique de caractère, puis­qu'elle préserve l'individualité de chaque personnage. Pourtant, ce sont moins ces pages que les airs tradition­nels plus ou moins archaïsants et cependant fort réussis qui ont assuré le succès de l'œuvre : couplets de Sganarelle (n° 3) ; sérénade (n° 6) et fabliau de Léandre (n° 9bis), sur des vers tirés de La Princesse d'Élide; couplets de Jacqueline (n° 7) ; air de Sganarelle (n° 10) ; chœur des fagotiers de l'acte I. La marche qui sert de finale à l'acte II est un morceau en « style ancien » ajouté par Gounod en 1851 à son arrangement de la musique de scène de Lully pour Le Bourgeois gentilhomme. C'est cette marche Allegro maestoso, la maj.) qui forme, avec l'introduction du chœur « Serviteur, Monsieur le docteur» (acte III, n° 11), la première partie de l'ouverture du Médecin malgré. L'Allegro en ré majeur qui suit est brillamment déve­loppé sur des fragments du sextuor de l'acte II.

Joël-Marie Fauquet (Dictionnaire des œuvres de l’art vocal)

Conférences sur cette œuvre

LE MÉDECIN MALGRÉ LUI de Charles Gounod

Conférence
Conférencier.ère: Georges Schürch

Théâtre de l'Espérance

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