Les Ballets russes - ballet
Il était une fois un homme qui n’était ni compositeur ni interprète, ni romancier ni poète, ni danseur ni chorégraphe, ni peintre ni décorateur. Rien de tout cela. Et pourtant cet homme changea le goût et la mode, provoqua la création de nombreux chefs-d’œuvre et exerça une influence capitale sur la musique, la danse et les arts de la scène. Cet homme prodigieux, c’est Serge de Diaghilev, fondateur en 1907 des Ballets russes, qu’il conduisit au succès jusqu’à sa mort en 1929. Car ce que cet imprésario de génie savait faire mieux que tout autre, c’est constituer une équipe, provoquer les rencontres, réunir des talents, susciter des œuvres nouvelles. A partir de danseurs de la troupe du Théâtre impérial de Saint-Pétersbourg (Anna Pavlova, Tamara Karsavina, Vaslav Nijinski), il fonde une compagnie de ballet, qu’il rend ensuite indépendante et fait voyager partout en Europe et dans les deux Amériques. Il fait travailler des artistes russes (Alexandre Benois, Léon Bakst, Michel Larionov), mais engage bientôt pour ses décors l’élite des peintres du temps : Picasso, Matisse, Derain, Braque, Chirico, Rouault. Il demande à ses chorégraphes (Michel Fokine, Vaslav Nijinski, Léonide Massine, Bronislava Nijinska, George Balanchine) de monter des ballets sur des musiques existantes, de Rimski-Korsakov, Borodine, Weber, Chopin, Schumann, Debussy. Mais surtout – et c’est sa contribution capitale au répertoire de la musique du XXe siècle – il commande des partitions nouvelles à Stravinsky, Ravel, Richard Strauss, Prokofiev, Poulenc, Auric, Milhaud, Satie.
Pour sa Soirée Ballets russes, le Grand Théâtre n’a pas voulu tenter de remonter les chorégraphies originales des Sylphides, du Spectre de la rose et de Petrouchka. Il a commandé des spectacles nouveaux. En quoi il est fidèle à l’esprit de Diaghilev, toujours à l’affût, prêt au risque et, si possible, accoucheur du chef-d’œuvre.
Pierre Michot